Introduction
Le 30 octobre 2024, le Centre national de la musique fêtait les cinq années de la loi qui lui donnait naissance. Si l’on ramène ces cinq années d’existence du CNM aux quatre-vingts ans du Centre national du cinéma (CNC), aux cinquante ans du Centre national du livre (CNL) ou encore aux trente ans du Centre national de la danse (CND)[1], on comprend pourquoi la musique a pu être qualifiée de parent pauvre des politiques culturelles[2]. Pourquoi la fondation d’une « maison commune » pour l’une des principales pratiques culturelles des Français[3] a-t-elle été si longue ?
Cet article propose de retracer le parcours de la création du CNM, avec toute l’humilité qu’impose le travail historique d’une chercheuse et d’un chercheur en sciences de gestion, bien conscients des partialités qu’induit une enquête qualitative menée sur un temps court (voir annexe méthodologique) et sur un objet dont ils furent proches (voir Biographies). Il s’agit à tout le moins de garder une trace de cette histoire, d’en former une mémoire. Il s’agit également de comprendre comment la création du CNM reflète la spécificité du secteur musical en tant que champ de la politique culturelle en France.
En retraçant l’histoire de la création du CNM, on explore en réalité quatre trajectoires parallèles : la relation entre l’État et la musique, abordée sous l’angle de la politique musicale, le développement du secteur musical lui-même, le fonctionnement de la puissance publique tant sur le plan politique qu’administratif, et enfin l’influence de certaines figures clés dont les initiatives personnelles ont marqué ces chronologies. Ensemble, ces quatre chaînes causales, relativement indépendantes, mais souvent entremêlées et parfois alignées, révèlent des séquences historiques et des moments décisifs qui ont façonné la création du CNM.
Cela nous amène à raconter cette histoire en quatre étapes : d’abord, les origines qui ont établi le concept d’un CNM, suivies par deux grandes tentatives de projet CNM, en 2011 (qui n’a pas abouti) et en 2017 (conduisant à la création du CNM), et enfin, les enseignements et perspectives après cinq ans d’existence de l’institution.
Cet article repose sur des entretiens semi-directifs réalisés avec une vingtaine de personnalités témoins, acteurs et actrices de l’histoire de la création de l’établissement. La liste de personnalités sollicitées a été déterminée conjointement par les auteurs et la direction du CNM. Une fois la liste établie, les demandes d’entretiens ont été adressées par le Centre National de la Musique. D’autres personnalités pressenties n’ont pas donné suite à notre invitation. Les entretiens ont été menés entre juin et septembre 2024 par la coautrice et le coauteur à partir d’un guide d’entretien établi en accord avec le CNM. Les entretiens (voir Tableau 1 : Liste des entretiens réalisés)
ont été complétés par des données secondaires : interviews, communiqués de presse, textes de lois, rapports, ouvrages, etc.
Tableau 1 : Liste des entretiens réalisés
Nom | Prénom | Projet CNM concerné | Fonction au moment du projet |
Bois | Pascal | Second projet | Député |
Cariou | Emilie | Second projet | Députée |
Colling | Daniel | Premier projet | Directeur du Printemps de Bourges et du Zénith de Paris |
Damerval | Guillaume | Second projet | Directeur de la SPEDIDAM |
El Sayegh | David | Premier projet | Directeur général du SNEP |
Franceschini | Laurence | Premier et second projet | Directrice générale de la DGMIC |
Gautier | Philippe | Second projet | Secrétaire général du SNAM-CGT |
Gourdin | Jean-Baptiste | Premier et second projet | Conseiller maître à la Cour des comptes |
Hannedouche | Aurélie | Premier et Second projet | Directrice du SMA |
Henrard | Olivier | Premier projet | Conseiller culture du Président de la République |
Laleix | Romain | Second projet | Vice-président du comité de préfiguration du Centre national de la musique |
Lion | Bruno | Premier et second projet | Président du FCM, Vice-Président de la CSDEM, Président de TPLM, puis Président de la SACEM |
Maistre | Roch-Olivier | Second projet | Conseiller maître à la Cour des comptes |
Nègre | Pascal | Premier et second projet | Président d’Universal Music France |
Nyssen | Françoise | Second projet | Ministre de la Culture |
Raoul | Laurence | Second projet | Directrice déléguée du Syndicat national des scènes publiques |
Roger | Jérôme | Premier et second projet | Directeur de l’UPFI |
Schwartz | Marc | Second projet | Directeur de cabinet de la ministre de la Culture |
Séguineau | Malika | Premier et second projet | Directrice juridique puis Directrice générale du Prodiss |
Selles | Didier | Premier projet | Rapporteur de la Cour des comptes |
Thiellay | Jean-Philippe | Second projet | Président du CNM |
Tronc | Jean-Noël | Premier et second projet | Directeur général de la SACEM |
Aux racines du CNM (après-guerre — 2007)
Deux projets de CNM véritablement pensés, concertés et administrés ont vu le jour, en 2011 et en 2017. Mais pour appréhender les politiques musicales dont ils sont issus, il convient de remonter le temps, jusqu’à l’après-guerre, période à partir de laquelle trois séquences fondatrices sont observables.
Une ébauche de CNM qui remonte aux années 70
L’histoire du CNM commence avec la naissance des politiques culturelles en France. Si le soutien de l’État à son encontre est quasi inexistant en 1959 lors de la création du ministère des Affaires culturelles d’André Malraux[4], la musique est par la suite l’un des premiers champs culturels à bénéficier d’une politique publique dédiée. Dès sa nomination à la Direction de la musique[5] en 1966 par Malraux, le compositeur Marcel Landowski lance un plan décennal visant à redynamiser ce secteur en difficulté, encore peu structuré. Au bout de ce programme, la musique reste singulièrement fragmentée[6] : le secteur mêle des modèles économiques très différents (droits de la propriété intellectuelle, revenus de la scène et ventes d’enregistrement), des structures contrastées (de l’association à la multinationale) et des pratiques variables selon l’esthétique musicale. Le plan décennal ne règle pas non plus les fragilités économiques.
C’est pourquoi lorsque Michel Guy est nommé secrétaire d’État à la Culture par Jacques Chirac en 1974, il charge Landowski de mettre en place un centre national pour la musique[7], capable de rassembler ses acteurs et de renforcer son économie. Avec le départ des deux principaux acteurs[8], l’idée perd de sa force, et cette première référence à un CNM n’a qu’un impact limité sur la politique musicale. Ce premier rendez-vous manqué marque toutefois un précédent : la volonté de créer un centre national financé par une taxe sur les bandes magnétiques et les magnétophones, inspiré par ce que pratique depuis 1946 le Centre national du cinéma qui bénéficie d’une taxe sur les recettes de billetterie des salles de cinéma[9].
Le CNC incarne alors un consensus qui règne dans l’intervention publique à partir de la Seconde Guerre mondiale : il s’agit pour l’État de créer des taxes parafiscales. Ces dernières ont alors au moins deux intérêts pour la puissance publique. D’une part, elles soulagent le travail de l’administration centrale puisqu’elles sont déléguées à des organismes externes chargés de leur négociation, de leur perception ou encore de leur redistribution, le tout sous contrôle public. D’autre part, elles ont une base et une affectation déterminées, ce qui permet de financer de manière ciblée un secteur précis, aidant ainsi à sa structuration[10]. Les politiques culturelles adoptent cette approche non seulement avec le CNC, mais aussi avec l’Association pour le Soutien du Théâtre privé (ASTP)[11], bénéficiaire en 1964 d’une taxe parafiscale sur les billetteries de spectacles, ainsi qu’avec le Centre national du livre, fondé officiellement en 1973.
La logique d’intervention publique dans laquelle se situe l’histoire du CNM est donc d’emblée celle-là : créer un outil relié à la puissance publique et qui gère une taxe.
L’intégration partielle des musiques « actuelles » aux politiques musicales
Disparue une première fois, l’idée d’un CNM réapparaît avec l’arrivée de la gauche et de Jack Lang au ministère de la Culture en 1981. C’est un tournant dans les politiques culturelles, et en particulier pour la musique. Trois grands enjeux jalonnent cette période : une baisse continue de son budget depuis une décennie, une mondialisation croissante et l’omniprésence de ce qui va progressivement être qualifié de « musiques actuelles »[12]. Dès son arrivée, le nouveau ministre défend une « politique de toutes les musiques »[13] qui s’efforce alors d’intégrer les musiques populaires dans une politique jusqu’alors essentiellement tournée vers les musiques « savantes ». Cette politique se matérialise en premier lieu par la hausse du soutien financier à la musique[14] ainsi que par trois séries de mesures aux effets structurants pour le futur de la filière musicale et du futur CNM.
La première série de mesures commence dès le début du mandat de Jack Lang : en 1981, la chanson, les variétés, le rock et le jazz se voient consacrer un budget au niveau du ministère de la Culture et un bureau dédié aux musiques actuelles au sein de la Direction de la musique[15]. En 1982, est lancée une Commission consultative pour la chanson et les variétés[16]. Puis en 1985, l’Union nationale des variétés, de la danse et du cirque (UNVDC) créée en 1982 par Serge Lama, obtient du ministère de la Culture la reprise en charge de la taxe parafiscale aux spectacles de variétés décrétée en 1977 au bénéfice de l’ASTP. La même année, le Réseau Rock, pôle d’informations et de mise en réseau des acteurs du rock, est fondé. Ce réseau créera le Centre d’information du rock et des variétés (CIR), qui deviendra l’IRMA[17] — l’une des cinq organisations fusionnées dans le CNM (voir Figure 1 : Les organisations à l’origine du CNM).
La deuxième série de mesures se concentre sur le renforcement du droit d’auteur. À partir des années 1980, l’État ne se contente plus d’être « mécène » selon les termes de Raymonde Moulin[18], il devient un « État protecteur et diffuseur » visant à amortir les risques des activités culturelles et à renforcer la protection sociale des artistes. Le secteur de la musique en bénéficie tout particulièrement, par le biais du renforcement du système de droits d’auteur : votée en 1985, la « loi Lang » stabilise le financement global de la filière et sa répartition, en instaurant un droit voisin du droit d’auteur pour les producteurs de phonogrammes ainsi que pour les artistes-interprètes. Les sociétés collectives gérant ces fonds créent en 1984, le Fonds pour la création musicale (FCM) — deuxième des cinq organisations fusionnées dans le CNM en 2019 (voir Figure 1 : Les organisations à l’origine du CNM).
Enfin, la gauche se fait le défenseur de l’exception culturelle, affirmant que les biens culturels ne sont pas des marchandises obéissant aux lois classiques du marché. C’est dans ce contexte de mondialisation qu’est créé en 1993 le Bureau Export — troisième organisation fusionnée dans le CNM en 2019 (voir Figure 1 : Les organisations à l’origine du CNM) —, organisme chargé d’accompagner les professionnels de la musique français dans leur développement à l’international. La loi Toubon, votée en 1994, instaure par la suite des quotas radio en faveur de la production francophone.
Grâce à ces mesures successives et à l’émergence de nouveaux organes de soutien, la filière musicale se consolide, en particulier les « musiques actuelles » et les « variétés », qui commencent à recevoir la reconnaissance institutionnelle d’un État qui les avait jusqu’alors marginalisées. Cependant, en 1998, le sentiment d’« orphelinat »[19] des musiques actuelles vis-à-vis de l’État demeure fort : la dispersion de l’action publique et les besoins croissants de professionnalisation continuent d’alimenter les demandes pour une intervention publique renforcée.
En réponse à ces demandes, le rapport Trautmann propose la création d’un centre national de la musique inspiré du CNC et du CNL, et financé par une taxe (plus précisément, une partie de la taxe sur le chiffre d’affaires publicitaire des chaînes de télévision) et complétée par les fonds déjà existants dans la filière, ainsi que par un budget ajouté par l’État[20].
La crise du disque comme fossoyeur du CNM.
Au tournant du XXIe siècle, plusieurs événements vont bousculer cet agenda. Le premier est le renforcement successif de l’éclatement de la politique culturelle à l’égard de la musique. Traditionnellement, l’État a traité de manière distincte les musiques « savantes » des musiques « actuelles », le spectacle vivant musical et la musique enregistrée, ou encore les activités relevant du marché et celles relevant de la subvention. Cette logique se confirme lorsqu’en 2002 l’État répond aux demandes des professionnels en créant un établissement public circonscrit au soutien du spectacle vivant et des musiques « actuelles » : le Fonds de soutien aux variétés devient le Centre national de la chanson, des variétés et du jazz (CNV) — quatrième organisation à être fusionnée dans le CNM en 2019 (voir Figure 1 : Les organisations à l’origine du CNM).
Plus encore, l’opportunité d’appréhender de manière unifiée les filières du spectacle et de l’enregistrement s’éloigne avec la création, en 2000, d’une Direction des médias au sein du ministère de la Culture, chargée des dossiers des « industries culturelles », parmi lesquelles la musique enregistrée. En 2010, cette direction des médias devient la Direction générale des médias et des industries culturelles (DGMIC) tandis que l’ensemble des directions qui s’occupent historiquement des sujets de création (dont le spectacle vivant et les musiques classiques) fusionnent dans la Direction générale de la création artistique (DGCA). Sont ainsi créées deux directions au sein même du ministère, qui développent peu à peu des approches politiques différentes l’une de l’autre, que l’on peut résumer ainsi : du côté de la DGMIC une logique de régulation industrielle, visant à soutenir la contribution à la diversité culturelle de secteurs marchands ; du côté de la DGCA une logique d’offre artistique, ayant pour priorité de soutenir la création et portée pour l’essentiel par le service public.
Mais l’événement majeur qui retarde à nouveau l’ambition d’un CNM est la dégradation économique du secteur musical au début des années 2000. Entre 2002 et 2007, l’activité phonographique en France perd la moitié de son chiffre d’affaires[21]. Face à la transformation numérique et la chute vertigineuse des revenus, c’est désormais la crise du disque qui détermine les relations entre l’État et le secteur de la musique. La musique enregistrée devient le sujet central des politiques musicales à travers deux axes prioritaires. Le premier, consensuel et rapidement mis en place, est le soutien financier aux acteurs en difficulté. En 2002, le Club Action des Labels et des Disquaires Indépendants Français (CALIF) — cinquième organisation fusionnée en 2019 (voir Figure 1 : Les organisations à l’origine du CNM) — se crée avec le soutien du ministère de la Culture dans le but d’aider les disquaires français. Puis en 2006, un crédit d’impôt est attribué aux producteurs phonographiques qui sont implantés en France et qui valorisent la création francophone[22].
Le second axe, plus houleux, concerne l’impact négatif des pratiques numériques sur les droits d’auteur. Pour pallier le contournement du système de propriété intellectuelle par le téléchargement illégal, la création d’une « licence globale » est proposée dans le projet de loi DADVSI de 2005. Cette proposition consistant à légaliser ces échanges en contrepartie d’une rétribution forfaitaire suscite de vifs débats qui divisent aussi bien les parlementaires de gauche que de droite. Dénoncée par la majorité des professionnels du secteur comme une atteinte à la propriété intellectuelle, la licence globale est finalement rejetée lors du vote de la loi DADVSI en 2006. Ce rejet entame une rupture durable entre la profession musicale et la gauche qui a été perçue comme majoritairement en faveur de la licence ; rejet que les présidentielles de 2012 viennent sceller (voir infra).
À l’issue de cette troisième séquence, l’idée initiée par le rapport Trautmann d’un CNM au service des musiques « actuelles » se retrouve complètement reléguée au second plan. D’une part, l’agenda politique des années 2000 est monopolisé par le bouleversement numérique, les questions de sauvetage de la musique enregistrée et de protection du droit d’auteur. D’autre part, la gauche, alliée politique de la relation foisonnante entre État et musique dans les années 1980 et 1990, a perdu une part de son crédit auprès du secteur musical.
C’est donc au cours du mandat présidentiel suivant que l’idée d’un CNM commence à prendre forme, envisagé comme un acteur clé pour le sauvetage de l’industrie du disque, la protection du droit d’auteur, et l’adaptation aux bouleversements induits par le développement du numérique.
Une première tentative de CNM (2007-2012)
La crise du disque comme catalyseur du CNM
L’arrivée de Nicolas Sarkozy à la présidence de la République en 2007 enclenche une nouvelle séquence politique et administrative favorable aux acteurs de la musique. Entre 2007 et 2009, les acteurs politiques et professionnels déploient de nouvelles modalités de soutien économique et juridique en faveur de la musique enregistrée. La branche phonographique, jusqu’alors vue comme purement marchande et éloignée de l’intervention publique, se voit progressivement ramenée dans le giron de l’État.
Ce soutien se matérialise par la mise en œuvre d’une politique renforcée de protection du droit d’auteur. Le rapport Olivennes[23] recommande l’instauration d’une réponse graduée et la création d’une autorité de contrôle, accompagnées du développement d’une offre légale. Ces actions ont été confirmées par les accords de l’Élysée du 23 novembre 2007, signés entre les fournisseurs d’accès à Internet (FAI) et les industries culturelles. Ces accords aboutissent entre autres à la création de la Haute Autorité pour la diffusion des œuvres et la protection des droits sur Internet (HADOPI) le 12 juin 2009, qui est chargée de surveiller et de sanctionner les actions de piratage d’œuvres culturelles en ligne.
Outre ces préconisations, le rapport Olivennes recommande d’aider le secteur à se doter de nouveaux modèles économiques. De cette volonté d’accompagnement resurgit le projet du CNM. Olivier Henrard, conseiller Culture auprès du président Sarkozy, se saisit de cette nouvelle éventualité d’un CNM. Lorsqu’il prend ses fonctions en décembre 2010, il est convaincu que le ministère doit se recentrer sur « l’élaboration de la norme de droit, et le pilotage de mécanismes de régulation et d’incitation »[24]. Dans cette logique, la conduite de politiques de soutien de filière doit être assurée par des établissements publics dédiés. Le Haut fonctionnaire trace un parallèle entre l’état du cinéma en 1946 au moment de la création du CNC, et celui du disque en 2010. Il considère que le moment est venu de créer un établissement équivalent pour la musique, et comme le cinéma en 1946, de doter le monde phonographique d’une taxe dédiée, complémentaire de celle alimentant le spectacle vivant, pour financer la reconstruction de son industrie. Il estime qu’un simple calque du modèle de financement du CNC n’est pas pertinent étant donné que les plateformes de streaming sont très récentes et n’ont pas encore stabilisé leur modèle économique.
La préfiguration du CNM
Une opportunité de financement du CNM se présente au travers de la taxe sur les services de télévision étendue aux distributeurs de services Internet (TST-D) qui a été créée en 2007 et qui présente un rendement très largement supérieur aux prévisions, laissant entrevoir la possibilité de financer la musique sans que cela se fasse au détriment de l’industrie cinématographique.
Tandis qu’Olivier Henrard défend ardemment le projet auprès du Président de la République le 11 avril 2011, il apparaît lors de nos entretiens que Frédéric Mitterrand, peu convaincu, délègue néanmoins à Didier Selles, Alain Chamfort, Daniel Colling, Marc Thonon et Franck Riester la tâche d’examiner les conditions et la pertinence de fonder un nouvel établissement consacré à la musique d’ici la fin de la mandature. Les concertations s’étendent sur le printemps et l’été 2011 et font émerger une large adhésion au projet parmi la profession. Le périmètre exact du nouvel établissement et ses sources de financement soulèvent cependant des réserves. Certains professionnels des scènes conventionnées ou d’esthétiques classiques ayant des liens étroits avec leur tutelle considèrent le ministère de la Culture comme étant déjà la maison commune de la musique. Ils ne souhaitent pas voir les politiques de soutien dont elles bénéficient et qui sont gérées par la DGCA ou la Direction régionale des affaires culturelles (Drac) transférées à un établissement autonome. Pendant leurs travaux, les porteurs de la mission se confrontent d’ailleurs aux fortes réserves de la DGCA, dont le périmètre d’intervention serait réduit par la création du CNM. D’autres professionnels des variétés craignent pour leur part de voir les moyens du CNM toujours limités à ceux du CNV, mais dilués dans un plus grand volume de bénéficiaires. L’industrie du disque, pour laquelle le projet CNM est initialement relancé, soutient en revanche le projet de manière unanime. Le rôle de Pascal Nègre[25], alors président-directeur général d’Universal France et chef de file de l’industrie du disque, s’avère d’ailleurs décisif dans l’adhésion de ses pairs aux principes du CNM.
Les consultations prennent fin en septembre 2011[26] et le rapport « Création musicale et diversité à l’ère numérique » est remis dans la foulée par ses auteurs au ministère. Pourtant, contrairement à l’usage et malgré les relances des rapporteurs, aucune conférence de presse n’est organisée pour présenter les conclusions du document aux professionnels. L’administration centrale ne semblant pas s’emparer du rapport, les rapporteurs décident de le publier eux-mêmes sur le site du ministère afin d’en assurer la publicité. Cette prise en main par les auteurs témoigne déjà de positions divergentes sur le projet CNM.
Leur rapport préconise de financer l’établissement musical en puisant dans le surrendement de la taxe sur les services de télévision due par les distributeurs (TST-D) qui alimente le CNC bien au-delà du produit budgété (ce qui ne lui aurait enlevé techniquement rien). La communication du rapport et des hypothèses de financement qu’il contient suscite la contestation du monde du cinéma, le CNC en tête[27].
Le 27 septembre 2011 se tient une réunion à l’Élysée, autour du président de la République, avec le Premier ministre et les ministres de la Culture et des Finances. Le président entérine le lancement de la préfiguration de l’établissement et autorise l’inscription du mécanisme de financement au budget de l’État de 2012.
La mission de préfiguration est lancée dans la foulée et confiée à Didier Selles qui mobilise rapidement la profession. Au Marché international du disque et de l’édition musicale (Midem) de janvier 2012 à Cannes, il obtient plus de 40 signatures d’organisations professionnelles pour un « Accord-cadre sur les missions, les ressources et la gouvernance du Centre national de la musique ». L’Association de préfiguration du Centre national de la musique (APCNM) est créée le 9 mars 2012.
En parallèle de ces travaux, la campagne présidentielle bat son plein. Le projet du président Nicolas Sarkozy est repris par son concurrent socialiste François Hollande qui s’engage dans son programme à faire « voter une loi d’orientation sur le spectacle vivant et (à reprendre) le chantier du Centre national de la musique, pour en faire un outil au service de la diversité culturelle »[28]. Son projet pour la culture, fidèle aux positions précédentes de la gauche sur la loi DADVSI, prévoit également de supprimer la HADOPI et de mettre en place la licence globale. Ces idées provoquent tant de remous dans le monde musical qu’elles sont rapidement retirées du programme[29] : François Hollande est élu Président de la République le 6 mai 2012, et son accession aux plus hautes fonctions entraîne l’arrivée de nouvelles figures au ministère qui s’apprêtent à reconfigurer la politique culturelle.
L’abandon du projet
Dès les semaines qui suivent cette élection présidentielle, le vent tourne pour l’APCNM. Les déclarations de la nouvelle ministre de la Culture Aurélie Filippetti au Festival de Cannes[30] inquiètent la profession musicale, car elle induit que le projet pourrait ne pas être pérennisé. La quasi-unanimité de la profession commence à battre de l’aile, et les interviews se répondent, entre les défenseurs du projet, comme Stéphan Bourdoiseau le 11 juin[31], et ses détracteurs. Le 21 juin 2012, le nouveau directeur général de la SACEM Jean-Noël Tronc provoque l’émoi dans une interview au Monde[32]. Il déclare trouver la comparaison du CNM et du CNC « absurde » et craint une « étatisation » des politiques musicales avec la création d’un établissement, que la SACEM et l’accord-cadre au Midem soutiennent pourtant formellement. Les déclarations de la ministre dans la Tribune du 4 juillet 2012 jettent un froid dans la profession, tant elles témoignent d’une défiance assumée à l’égard des travaux de préfiguration qui y sont qualifiés d’« irresponsables » et présentés comme « non budgétés »[33]. L’association de préfiguration poursuit néanmoins ses travaux tout l’été, dans la plus grande incertitude.
Par ailleurs, l’établissement rencontre des difficultés administratives : bien qu’une subvention de fonctionnement ait été octroyée par la mandature précédente, le directeur de l’APCNM ne parvient pas à ce qu’elle soit effectivement versée, ce qui implique sa responsabilité personnelle pour le règlement des loyers et des salaires. Une passe d’armes est même nécessaire pour débloquer la situation.
Le 10 septembre 2012, le monde musical apprend par voie de presse l’abandon du projet CNM. L’interview accordée au Monde par la ministre, où elle déclare qu’il n’y a pas « réellement besoin d’un nouvel établissement public » ne laisse guère de doute. Les espoirs suscités par les consultations et la phase de préfiguration chez la majorité des acteurs musicaux sont anéantis. Le président de l’APCNM, ainsi que son directeur Jean-Baptiste Gourdin, qui avait suivi les travaux depuis sa mission en tant que rapporteur, démissionnent peu après.
Nous n’avons pas rencontré Aurélie Filippetti dans le cadre de cet article, mais sa décision d’abandonner le projet a été très souvent commentée dans les entretiens réalisés avec les protagonistes de ce premier CNM. Si jusque-là les analyses des protagonistes de cette histoire contrariée du CNM sont assez similaires, elles divergent nettement quant aux raisons de cet abandon. La ministre était-elle déjà nourrie de l’hostilité du monde du cinéma à l’égard du CNM à sa prise de poste ? A-t-elle été sensible aux réserves de la DGCA ? Était-ce, comme d’autres le pensent, que ce projet trop porté par un gouvernement de droite en était devenu une variable d’ajustement pour ce gouvernement d’alternance ? Ou encore, étaient-ce les choix de financement et de modélisation du CNM, trop pensés sur le décalque du CNC qui auraient causé l’échec du projet ? Avait-elle seulement la latitude de rendre des arbitrages aussi contraires aux souhaits de l’industrie cinématographique ? Après tout, comme l’indique une personnalité au cours d’un entretien, on n’a encore jamais vu de Président français prendre des décisions qui déplaisent au septième art. Il est indéniable qu’une volonté politique ferme et l’engagement des plus hauts dirigeants de l’État auraient été essentiels pour que ce projet se concrétise.
Le 25 octobre 2012 lors du MaMA[34], convention du monde musical se tenant à Paris, la ministre réaffirme devant un parterre professionnel sa vision selon laquelle un établissement nouveau n’est pas nécessaire pour améliorer les politiques publiques musicales. Elle dévoile également le lancement d’une « mission musique »[35] au sein du ministère, qui sera transversale et située entre ses deux directions dédiées au domaine musical, la DGCA et la DGMIC. Même si les contours de cette mission restent flous, elle assure le maintien des prérogatives au ministère, prérogatives que l’on avait un temps pensé confier au CNM. S’agissant de l’évolution des politiques publiques en elles-mêmes, elle renvoie aux conclusions de deux autres missions en cours, Lescure, d’une part, et Colin et Collin, d’autre part, qui traitent respectivement du devenir de l’exception culturelle française dans un monde numérique, et de la fiscalité du numérique. Il est à noter que si le rapport Lescure, rendu en mai 2013, relance l’idée de piocher dans la TST-D pour alimenter une autre filière culturelle, c’est cette fois à la photographie qu’il est proposé d’en faire bénéficier. Cette recommandation achève d’enterrer cette piste de financement pour le CNM.
L’aboutissement du second projet CNM (2017-2019)
La convergence des luttes
Le second projet CNM, qui apparaît en 2017, plonge ses racines dans la période même où l’on pense le premier projet enterré. Bien que l’année 2012 ait marqué un coup d’arrêt pour la création de l’établissement, de 2012 à 2017, chaque composante de la filière continue de se battre pour que l’État la soutienne. Ces batailles sont menées séparément et sans perspective d’un CNM, mais elles plantent tout de même les graines du projet à venir.
Durant cette période, la branche de l’édition musicale engage une lutte pour la protection de la propriété intellectuelle. En 2012, sous l’égide de la SACEM, les éditeurs lancent une campagne exhortant l’État à sauvegarder la copie privée, qui représente pour eux une source de financement essentielle, bien qu’elle soit contestée par les producteurs électroniques qui en supportent le coût[36]. Puis, en 2017, ils s’impliquent activement dans la lutte contre la ratification du traité ACTA[37], proposé au niveau européen et vivement débattu : les organismes de gestion collective des droits musicaux se positionnent ainsi à la pointe du combat contre les ambiguïtés du texte relatives à certaines violations du droit d’auteur.
De son côté, la branche de la musique enregistrée est confrontée à la crise du disque. Ses représentants travaillent alors au renforcement du crédit d’impôt pour la production phonographique créé en 2006. À défaut de l’existence d’un CNM, ils obtiennent une première prolongation du dispositif dès 2012 à l’arrivée de la ministre Filipetti, puis une seconde en 2014, accompagnée d’un relèvement du plafond et de l’élargissement des dépenses éligibles. Devenu un soutien financier indispensable pour ces acteurs, le crédit d’impôt sera incorporé dans le CNM créé en 2019.
Toujours dans le périmètre de la musique enregistrée, l’accord Schwartz est signé en octobre 2015 entre artistes, plateformes numériques et producteurs phonographiques. Il a pour objectif de stabiliser le modèle du streaming en favorisant une répartition équitable de la valeur. Le protocole établi[38] préconise de mettre l’accent sur l’Observatoire de l’économie de la musique, intégré par la suite au CNM. Mais surtout, face à la dispersion significative de la filière révélée lors des concertations et après avoir entendu les regrets exprimés par certains professionnels depuis 2012, Marc Schwartz, le médiateur de l’accord, emporte la conviction de la pertinence d’un CNM.
Enfin, l’année 2015 marque, pour le secteur du spectacle vivant, un tournant dans sa relation aux pouvoirs publics : les attentats perpétrés au Bataclan sont un véritable traumatisme pour la profession. En plus du choc suscité, ils entraînent la hausse des coûts de sécurité pour les lieux et les festivals. En soutien, un Fonds d’urgence au spectacle vivant, géré par le CNV, se met en place dès 2015. Dans le même temps, certaines organisations représentantes de cette branche alertent les pouvoirs publics sur la concentration économique croissante qui s’opère dans le live[39] : à la multiplication des rachats par de grands groupes internationaux, elles opposent le besoin de régulation et la mise en place d’un droit voisin pour les producteurs de spectacles, pour lequel elles militent depuis plusieurs années.
Le dialogue avec les pouvoirs publics s’avère alors éclaté entre les différentes branches de la filière musicale, et n’est pas toujours bien organisé. Mais les besoins discutés font à nouveau naître dans l’esprit des organisations qui portent ce dialogue l’idée d’un établissement public qui rassemble la filière et qui soit plus ambitieux que les dispositifs publics existants.
Il faut y ajouter que la filière dans son ensemble parvient, entre l’année 2012 et l’année 2017, à tisser un dialogue interprofessionnel et à mener des combats communs. Dans un contexte de plus en plus mondialisé, une dynamique se forme alors autour de l’international, enjeu devenu central pour des métiers de plus en plus interpénétrés. Elle se matérialise en 2016 par l’arrivée d’une nouvelle gouvernance au Bureau Export puis en 2017 par le doublement de la subvention à cet établissement. Ce succès donne alors la sensation aux organisations professionnelles[40] qui l’ont obtenu, qu’elles peuvent peser ensemble efficacement sur l’orientation de la politique musicale.
Le CNV devient un autre lieu de connexion pour les branches musicales. Sa présidence est aussi renouvelée en 2013, avec notamment pour mission de participer au rassemblement de la filière autour des études et de l’observation : cette réflexion aboutira au transfert de l’Observatoire de la musique au CNV en 2016[41]. Pour finir, les professionnels de la musique, réunis au sein de l’association Tous Pour La Musique, s’engagent dans des campagnes de lobbying visant à promouvoir l’ensemble de la filière musicale. Ils publient des données sur son poids économique[42] et développent un récit autour de la nouvelle dynamique de la musique enregistrée, qui connaît un rebond de croissance grâce à la pérennisation du streaming.
De nouveaux moyens acquis auprès de l’État, la stabilisation des modèles économiques, des enjeux communs ou encore les quelques lieux rassemblant déjà la filière : tels sont donc les ingrédients d’une relative conscience collective parmi les professionnels qui naît à l’aube de l’élection présidentielle de 2017. Ils seront le ciment d’un nouvel intérêt partagé pour le CNM.
Anatomie d’une volonté politique
Bien que les combats institutionnels menés par la filière musicale semblent former un terreau fertile à la renaissance d’un projet CNM, le traumatisme du projet avorté en 2012 est toujours bien présent à la veille de l’élection d’un nouveau Président de la République. Dès lors, il manque un déclencheur à l’échelon politique — à l’instar de 2012 — pour lever les obstacles, insuffler un élan et véritablement relancer le projet.
Cette « volonté politique », souvent citée au cours des entretiens, s’avère en réalité un cheminement complexe de décisions prises aux différents étages de l’État. C’est tout d’abord l’arrivée de Françoise Nyssen au ministère de la Culture, en mai 2017, qui crée un nouveau point de bascule dans l’histoire de la création du CNM. Acceptant au dernier moment le poste de ministre, Nyssen arrive sans programme pour la musique[43], mais avec des convictions : celle que la musique est capitale dans l’éveil citoyen, et que les acteurs culturels ont besoin de lieux — au-delà du ministère — pour coordonner leurs actions à l’échelle nationale et partager une connaissance approfondie de leur filière.
Ces convictions trouvent immédiatement un écho chez son directeur de cabinet, Marc Schwartz, qui suggère à la ministre l’intérêt d’un potentiel CNM, déjà constaté lors de sa mission de médiation en 2015. Avec la réunion de la filière musicale au Midem début juin 2017[44], il s’agit de faire de premières annonces pour ce nouveau mandat : la ministre et son cabinet y voient l’opportunité de relancer le CNM.
L’annonce, décidée en un temps très court et sans certitude quant à la faisabilité du projet, crée néanmoins une dynamique politique qui embarque les acteurs politiques et professionnels. Ces derniers, surpris de la relance soudaine du projet, se répartissent alors en trois groupes. Le premier est celui des réticents[45], inquiets que la création d’un établissement public hors du ministère suscite un désengagement de l’État, ou craignant que l’action de cet établissement les marginalise. Le deuxième est celui des enthousiastes, qui militent et travaillent depuis longtemps pour un CNM, et qui y voient une augmentation des moyens pour la musique et la possibilité d’un lieu de discussions en commun. Le troisième est celui des réalistes, à la fois inquiets et enthousiastes[46], qui participent à ce nouveau volet sans s’engager pour autant plus avant.
L’adhésion n’est donc ni absolue ni inconditionnelle — le scepticisme après l’échec de 2012 persiste — mais la filière s’aligne dans l’ensemble assez rapidement derrière le projet. Il est ici intéressant de noter que c’est la réception positive par la filière de l’annonce autant que l’annonce elle-même qui a acté la relance du CNM : l’interprétation de la filière a ancré et amplifié une dynamique politique enclenchée, mais encore fragile.
Du côté des acteurs politiques justement, l’Élysée, Matignon et Bercy sont, au départ, plutôt opposés à la perspective d’un nouvel établissement public qui mobiliserait de nouveaux moyens budgétaires, pour une filière qui ne relève pas des priorités présidentielles. De même, la DGCA et la DGMIC ont été échaudées par les frottements vécus dans la préfiguration de 2012. Les figures de Françoise Nyssen et de Marc Schwartz jouent ici un rôle clé : la ministre s’engage personnellement pour convaincre l’exécutif — lors de conseils de ministres ou de moments informels — de la pertinence du projet, tandis que son directeur de cabinet travaille à s’assurer le concours des deux directions du ministère de la Culture. Elles ouvrent ainsi la voie à l’obtention d’arbitrages ministériels en faveur du projet d’une part et au soutien de l’administration centrale d’autre part. Les mécaniques de l’appareil d’État s’alignent.
L’engagement des acteurs politiques, qui s’était étiolé en 2012, s’affermit au contraire en 2017, avec la commande d’un rapport au conseiller maître à la Cour des comptes Roch-Olivier Maistre dès la fin du mois de juin[47]. Comme c’est souvent le cas pour les missions confiées par un gouvernement, l’intention est de revisiter le sujet du CNM, de le mettre à jour, et de gagner du temps pour que les pouvoirs publics puissent rendre leurs décisions, avec en perspective l’inclusion du financement du CNM dans le Projet de Loi de Finances 2018.
Publié en novembre 2017, le rapport « Rassembler la musique »[48] prolonge les diagnostics posés par la ministre et son cabinet. Il atteste du besoin de bâtir un consensus entre des acteurs historiquement fracturés et pourtant liés par des sujets les incluant tous (observation, international, formation, défense de la diversité, etc.). Il en déduit la nécessité de créer — à l’image du cinéma ou du livre — un lieu commun pour la filière, qui lui permettrait de se fédérer et ainsi de dialoguer plus efficacement face aux pouvoirs publics. L’autre argument du rapport qui mérite d’être relevé est la création d’un CNM permettant d’externaliser les activités opérationnelles des administrations centrales[49] afin qu’elles se désengorgent et se reconcentrent sur le pilotage des politiques publiques. On retrouve ici l’esprit décentralisateur de la politique musicale d’après-guerre (ses taxes parafiscales et son plan décennal) et de celle du premier projet CNM.
Le rapport est toutefois soucieux de ménager la profession et l’administration : il veille à ne pas reprendre le projet de 2012 et à ne pas être trop technocratique. De ce fait, il ne répond pas complètement aux trois enjeux fondamentaux au fondement d’un potentiel CNM. Son financement tout d’abord : l’obtention de moyens supplémentaires, déjà promise en 2011, est une condition posée par de nombreux acteurs de la filière. Sa gouvernance ensuite : la reprise d’un établissement public existant et la place de l’État dans le Conseil d’administration génèrent des tensions. Son périmètre, enfin : des interrogations persistent autour de l’intégration des musiques classiques ou de l’élargissement des bénéficiaires des aides. Quoi qu’il en soit, le projet d’un CNM ne parvenant pas à s’intégrer au Projet de Loi de Finances 2018 et le consensus dans la profession n’étant pas encore assez fort, la création de l’établissement est repoussée.
Le dénouement par la voie parlementaire
Néanmoins, le rapport Maistre a rempli un de ses objectifs : obtenir des arbitrages politiques allant dans le sens de la création d’un établissement public pour la musique. Ainsi, le Premier ministre Édouard Philippe donne son aval au projet par une lettre de mission adressée le 7 mai 2018 aux députés Pascal Bois et Émilie Cariou, qui font partie des rares connaisseurs des sujets culturels[50] au sein de la majorité présidentielle : leur mission est de prolonger la réflexion amorcée par le rapport Maistre, d’en renforcer la légitimité par une assise démocratique et de préciser les contours techniques de l’établissement avant de l’ancrer par la loi.
C’est aussi auprès des professionnels de la musique qu’il s’agit de « cranter » le projet et en cela, la mission Bois-Cariou a bénéficié d’un temps pour dialoguer avec ces derniers et affiner ses propositions avec eux. Les rassemblements comme le Midem en juin et les Francofolies de La Rochelle en juillet 2018 deviennent des espaces de concertation entre la filière et les représentants parlementaires. Ils permettent de renforcer le sentiment de cohésion et d’adhésion au projet du CNM, aussi bien parmi les différentes professions qu’entre l’administration et l’exécutif.
Tout comme en 2017, le rapport cherche à débloquer un budget au PLF 2019. Mais le rendez-vous est à nouveau manqué : entre le prolongement des auditions, les désaccords persistants sur les trois nœuds déjà présents lors du rapport Maistre (gouvernance, périmètre et surtout financement), l’affaiblissement médiatique de la ministre Nyssen et un appareil d’État mobilisé sur la crise des Gilets jaunes, le rapport Bois-Cariou n’est remis au Premier ministre qu’en février 2019. Les doutes de Matignon restent toujours présents.
Cette période de flottement n’enterre toutefois pas le projet, d’autant que le nouveau ministre de la Culture, Franck Riester, maîtrise bien le dossier (voir supra) et a la confiance des parties prenantes. Dès sa nomination en octobre 2018, il annonce une dotation de 5 M€ pour la préfiguration opérationnelle de l’établissement, à savoir la fusion de cinq structures (Bureau Export, CNV, FCM IRMA, et finalement le CALIF) et la préparation de décrets pour la mise en œuvre administrative. Une préfiguration est officiellement pilotée à partir de mars 2019 par un comité présidé par Catherine Ruggieri, alors Inspectrice générale des affaires culturelles et qui avait contribué à la précédente préfiguration en qualité de vice-présidente de l’APCNM.
Parallèlement au lancement de ce comité de pilotage, la proposition de loi pour la création du CNM est déposée au Parlement par le député Bois, nommé rapporteur. Le travail parlementaire est relativement fluide : le député, le ministre de la Culture et son administration, les organisations professionnelles et les représentants parlementaires des différents bords politiques se mettent au diapason, au prix de quelques amendements.
Dès le mois de mai, la proposition de loi est adoptée à l’Assemblée nationale, puis en juillet au Sénat, le texte étant rapporté par le sénateur Jean-Raymond Hugonet, lui-même musicien. En septembre, 7,5 millions d’euros sont inscrits au PLF 2020 pour le financement du Centre national de la musique et le 30 octobre, la loi no 2019-1100 relative à la création du CNM est promulguée (elle est publiée au Journal officiel le lendemain). Le CNM est créé au 1er janvier suivant.
Figure 1 : Les organisations à l’origine du CNM[51]
Bilan et prospective
La loi no 2019-1100 du 30 octobre 2019 relative à la création du Centre national de la musique constitue le fait générateur de la naissance de l’établissement. L’espace nous fait défaut pour décrire les étapes qui ont suivi cette loi, notamment la transition du CNV au CNM, sa structuration, et l’intégration des structures citées plus haut. Pour relater cette histoire, il nous a également manqué les témoignages des équipes ayant traversé ces étapes, ce qui explique pourquoi la loi du 30 octobre 2019 délimite la fin de notre récit. Cinq ans plus tard, nous avons jugé intéressant de solliciter nos interlocuteurs pour obtenir un bilan des premiers pas de l’établissement dans le secteur musical, que nous présentons ici brièvement.
La crise sanitaire comme révélateur
Il semble tout d’abord que le CNM a suffisamment fait la preuve de son bien-fondé pour qu’aucune personnalité ne remette en cause son existence, à l’exception de celles qui s’étaient déjà opposées avec constance au principe même de sa création. Si des points de vue différents existent dans les analyses recueillies, notamment sur la réussite du CNM à avoir unifié le secteur musical au-delà du seul dialogue entre ses diverses composantes. Alors que nous rédigeons cet article, la refonte des aides qui est en cours est également perçue comme un défi à surmonter, étant donné que les premières années de l’établissement ont été principalement consacrées au soutien du secteur durant la crise sanitaire.
Un point suscite en revanche l’unanimité : « Heureusement qu’on avait le CNM ! » a-t-on pu entendre tout au long des entretiens préalables à l’écriture de cet article. L’établissement a fait la démonstration de son utilité et de sa capacité à répondre aux enjeux de la filière pendant la crise sanitaire du coronavirus. Cette compétence s’est illustrée dans son efficace distribution de près de 430 millions d’euros d’aides aux acteurs de la filière musicale, bien loin des montants pour lesquels il était humainement équipé, et ce alors qu’il venait d’être créé. Cette compétence s’est également distinguée dans la manière dont il a fait montre d’une forte capacité de gestion et d’écoute de la filière, jusqu’à parvenir à modéliser de nouvelles aides en pleine crise. C’est pourquoi à plus d’un titre, la crise sanitaire aura constitué pour le CNM une triste, mais réelle opportunité de faire ses preuves.
Défis à venir
Les défis qui se posent à l’établissement pour les années à venir relèvent tous, selon les analyses recueillies, des trois points ayant structuré l’histoire de la création du CNM : sa gouvernance, son modèle de financement et son périmètre.
L’évolution de sa gouvernance tout d’abord suscite des positions contraires. Celle-ci est actuellement composée d’un président entouré d’un large conseil d’administration de 26 membres et d’un conseil professionnel composé de quarante et une personnalités et organisations. Cette gouvernance est considérée comme trop élargie pour certains qui la voudraient resserrée autour des représentants de l’État, auprès desquels les professionnels ne tiendraient plus qu’un rôle de consultation. À l’inverse, d’autres organisations préfèreraient voir leurs prérogatives élargies dans un conseil d’administration où les acteurs professionnels sont actuellement minoritaires.
Le financement du CNM, ensuite, constitue toujours un point de fragilité. Tout d’abord, le passage du CNV au CNM ne semble pas pleinement abouti et la question de la place du secteur classique dans le financement du CNM reste entière. Certains considèrent en effet que toute structure du périmètre du CNM, y compris celles du secteur musical subventionné, devrait contribuer à son financement. Par ailleurs, l’enjeu du volume et de la stabilité des financements n’est pas totalement réglé. La séquence du coronavirus a démontré la capacité du CNM à obtenir des montants exceptionnels de crédits budgétaires. Plus encore, il faut relever l’obtention d’une source nouvelle de financement pérenne avec une taxe sur le streaming musical au 1er janvier 2024, dans un contexte pourtant défavorable en tous points à la création d’un nouvel impôt. Malgré ces succès, les incertitudes persistent, que ce soit autour du rendement de cette taxe streaming ou de la continuité des crédits budgétaires. En ce sens, la part des taxes fait débat : d’aucuns appellent à renforcer le montant de celles-ci, notamment du streaming, et d’arrêter de fonctionner avec des crédits budgétaires, quand d’autres revendiquent le maintien d’une taxe streaming au volume modéré. Enfin, la contribution des organismes de gestion collective (OGC) au financement de l’établissement se pose. Un des auteurs du rapport « Création musicale et diversité à l’ère numérique » qui a découlé de la mission Selles regrette à ce titre que la contribution correspondant aux budgets d’action culturelle des OGC n’ait pas été actée dans le financement de l’établissement en 2019 alors que les OGC avaient accepté ces modalités de contribution en 2012.
Pour finir, la réforme des aides et les priorités déterminées pour l’action future du CNM mobilisent les idées les plus différentes. Un de nos interlocuteurs suggère par exemple que l’action de l’établissement devrait se concentrer sur le soutien à la diversité et à l’export plutôt qu’à la transition écologique, sujet sur lequel il n’aurait pas les moyens de « peser ». Cette pensée interroge : si l’État n’est pas en mesure de peser sur les évolutions des acteurs économiques au travers de sa politique et de ses établissements publics, qui le peut ? Une chose est sûre, la capacité de l’établissement à peser sur les évolutions sociales et écologiques du secteur, tout en soutenant l’action des acteurs pris dans une conjoncture difficile, dépendra de la prévisibilité de ses sources de financement.
Conclusion
Ce travail a permis de documenter la mémoire de la création du CNM et d’en établir une chronologie précise. En filigrane, il s’agissait aussi de déterminer en quoi cette création incarne les spécificités du champ musical en termes de politiques publiques et de comprendre pourquoi la relation entre État et musique fut si erratique. Cette conclusion est l’occasion d’en tirer les principaux enseignements.
Bien loin d’une histoire linéaire, la création du Centre national de la musique s’est faite par à-coups. La reconstitution des points de vue et des souvenirs de certains des principaux acteurs de cette création révèle une histoire négociée, parfois bricolée, composée de chronologies simultanées, d’événements et de décisions — imparfaitement documentées, il faut l’admettre — qui se jouaient en parallèle.
Bien des fils sont apparus spontanément au cours de notre travail de recherche, que le présent format ne permet pas de traiter entièrement de manière convenable. Certains auraient pourtant mérité d’être tirés pour recomposer l’histoire du CNM dans tous ses aspects. Parmi ces fils, il nous semble que l’histoire de la place accordée aux femmes dans la politique musicale, que ce soit dans la sphère des politiques publiques ou dans la filière elle-même, pourrait être davantage investiguée. La composition majoritairement masculine du panel de personnalités interrogées, qui détenaient ou détiennent les responsabilités de cette politique, en est un premier indice. Le vécu des femmes interrogées ou évoquées lors des entretiens en est un second signal. Aussi, il nous semblerait intéressant que ce sujet fasse l’objet de travaux futurs.
De toutes les caractéristiques que nous avons identifiées dans cette relation entre État et musique, la seule qui nous semble propre au champ musical est sa fragmentation, que nous avons déjà évoquée à plusieurs reprises. Celle-ci permet de comprendre les tergiversations du secteur dans son désir d’intervention de l’État, dont on comprend qu’il ait lui-même peiné à apporter des réponses unifiées au secteur. Cet enjeu fondamental dans la création du CNM reste, aux dires de nombre d’acteurs, cardinal pour cet établissement public et pour l’écosystème musical.
Deux autres caractéristiques de cette histoire dépassent enfin le seul cas de la musique.
D’abord, le CNM a été l’objet, comme d’autres projets et initiatives avant lui, de la confrontation entre deux visions rivales de l’intervention publique. Une dynamique de centralisation des services ministériels à la culture d’une part, et une tendance à créer des outils hors de l’administration centrale d’autre part.
Ensuite et pour finir, la naissance effective de l’établissement a été conditionnée à l’alignement de nombreuses volontés politiques : celles-ci se sont exprimées et ont pesé sur le devenir du projet au travers d’impulsions individuelles, de stratégies d’intervention (notamment par le biais de missions et de rapports), du soutien des administrations et de rendu d’arbitrages portés par le personnel politique.
Le secteur musical s’est pleinement approprié le CNM pendant les cinq premières années de son existence. Les défis qu’il devra relever dans les années à venir sont nombreux, parmi lesquels la consolidation de son financement ou la pérennisation de ses dispositifs de soutien. Le plus ambitieux de tous les défis réside à notre sens dans l’unification d’une filière dont la fragmentation persiste.
[1] Respectivement créés en 1946, en 1973 et en 1998.
[2] TRONC J-N., « La musique délaissée », Commentaire, 2017/2 (no 158), p. 397-406. DOI : 10.3917/comm.158.0397. URL : https://www.cairn.info/revue-commentaire-2017-2-page-397.htm.
[3] LOMBARDO P. et WOLFF L., Cinquante ans de pratiques culturelles en France, Culture études, 2020, vol. 2, no 2, p. 1-92.
[4] Lors d’un discours à l’Assemblée nationale le 14 octobre 1965, Malraux disait : « En ce qui concerne la musique (…) il y a une part de carence de l’État, mais il y a aussi quelque chose d’assez étrange : c’est qu’on ne m’a pas attendu pour ne rien faire ».
[5] Créée en 1966, la Direction de la musique est un service du ministère des Affaires culturelles qui fut chargé de la mise en place de mesures spécifiques à la musique.
[6] SAEZ G., La musique au cœur de l’État : regards sur l’action publique de Marcel Landowski [actes de la journée d’études tenue à Paris, Centre d’histoire de Sciences Po, 17 mai 2015]. La Documentation française, 2015.
[7] Ibid.
[8] Landowski en 1975 et Guy en 1976.
[9] Taxe mise en place à partir de 1948. À noter que si le CNC a officiellement été créé à la Libération, sa genèse remonte au Front populaire. Voir en ligne https://imagesdelaculture.cnc.fr/-/jean-zay-ministre-du-cinema.
[10] CHARBONNIER R., La régulation à l’épreuve du changement : le cas de la musique. Thèse de doctorat, École Polytechnique, novembre 2022.
[11] D’abord ciblée sur les spectacles lyriques, chorégraphiques et dramatiques propres au monde des théâtres parisiens, la taxe s’ouvre peu à peu aux spectacles de variétés (qui prennent de plus en plus de place), sans pour autant inclure les musiques classiques et contemporaines. C’est pourquoi, en 1977, est créée une nouvelle taxe parafiscale ainsi qu’une commission d’aide dédiée, toutes deux consacrées aux spectacles de variétés et gérées par l’ASTP.
[12] LE GUERN P., En arrière la musique ! Sociologies des musiques populaires en France. La genèse d’un champ, Réseaux, 2007/2-3 (nos 141-142), p. 15-45. URL : https://www.cairn.info/revue-reseaux1-2007-2-page-15.htm.
[13] VEITL A. et DUCHEMIN N., Maurice Fleuret : une politique démocratique de la musique, 1981-1986, Comité d’histoire du ministère de la Culture, 2000.
[14] Elle-même liée à une hausse plus générale du budget de la culture.
[15] KELBERG D., La Chanson française et les pouvoirs publics, FeniXX, 1997.
[16] LANG J. et MARTEL F., Une révolution culturelle : dits et écrits. Bouquins, 2021.
[17] CASTAGNAC G., « Y’a pas de quoi, c’était l’IRMA », 21 octobre 2020, en ligne : https://archive.wikiwix.com/cache/index2.php?rev_t=19981130000000&url=https%3A%2F%2Fwww.irma.asso.fr%2FY-a-pas-de-quoi-c-etait-l-IRMA#federation=archive.wikiwix.com&tab=url.
[18] MOULIN R., L’artiste, l’institution et le marché, Flammarion, 1992.
[19] Page 8 du rapport « Les Musiques actuelles : rapport à Catherine Trautmann, ministre de la Culture et de la Communication », commandé à Alex Dutilh, alors président de la Commission nationale des musiques actuelles et remis le 1er septembre 1998, en ligne : https://www.vie-publique.fr/rapport/24387-les-musiques-actuelles-rapport-catherine-trautmann-ministre-de-la-c.
[20] Page 23 du rapport.
[21] « Les majors de la musique changent de disque », La Tribune, 25 janvier 2008, p. 30-31.
[22] Crédit d’impôt en faveur de la production phonographique (CIPP).
[23] « Le développement et la protection des œuvres culturelles sur les nouveaux réseaux ». Mission confiée à Denis Olivennes. Rapport au ministre de la Culture et de la Communication, novembre 2007.
[24] HENRARD O., « Dans la mêlée », Cahiers de la fonction publique no 304 — octobre 2010, en ligne : https://fr.linkedin.com/pulse/vers-un-minist%C3%A8re-des-industries-culturelles-olivier-henrard.
[25] Dont le président Sarkozy et son équipe ont pris contact par le biais de Carla Bruni. Cette mise en relation est d’ailleurs la seule intervention de l’artiste dans l’histoire du CNM.
[26] « Création musicale et diversité à l’ère numérique », rapport au ministre de la Culture et de la Communication, septembre 2011, en ligne : https://www.culture.gouv.fr/espace-documentation/Rapports/Rapport-sur-la-creation-musicale-et-diversite-a-l-ere-numerique.
[27] https://fede-felin.org/2011/10/11/veille-actu-medias-du-11-octobre-2011/#more-1116.
[28] « Les 60 engagements de Hollande », Libération, 26 janvier 2012, en ligne : https://www.liberation.fr/france/2012/01/26/les-60-engagements-de-hollande_791303/.
[29] https://atlantico.fr/article/decryptage/francois-hollande-license-globale-telechargement-programme-numerique-indecision-changement-authueil.
[30] « Les priorités d’Aurélie Filippetti », France culture, 21 mai 2012, en ligne : https://www.radiofrance.fr/franceculture/les-priorites-d-aurelie-filippetti-6240690.
[31] « Je n’imagine pas que le projet de création du CNM puisse être abandonné », Interview de Stephan Bourdoiseau, Les Échos, juin 2012, en ligne : https://www.lesechos.fr/2012/06/je-nimagine-pas-que-le-projet-de-creation-du-cnm-puisse-etre-abandonne-358234.
[32] « Pour Jean-Noël Tronc, la Hadopi est “légitime” », Le Monde, 21 juin 2012, en ligne : https://www.lemonde.fr/economie/article/2012/06/21/pour-jean-noel-tronc-la-hadopi-est-legitime_1722574_3234.html.
[33] « Aurélie Filippetti : Le Centre national de la musique n’est “absolument pas budgété” », La Tribune, 4 juillet 2012, en ligne : https://www.latribune.fr/journal/edition-du-2706/entreprises/705884/aurelie-filippetti-le-centre-national-de-la-musique-n-est-absolument-pas-budgete.html.
[34] https://mama-musicandconvention.com/.
[35] Allocution de la ministre disponible en ligne : https://www.dailymotion.com/video/xv3j18.
[36] « Jean-Noël Tronc (SACEM) : “Le politique doit s’emparer de la copie privée, qui doit être étendue” », La Tribune, 14 novembre 2012, en ligne : https://www.latribune.fr/technos-medias/electronique/20121114trib000730965/jean-noel-tronc-sacem-le-politique-doit-s-emparer-de-la-copie-privee-qui-doit-etre-etendue.html.
[37] Accord Commercial Anti Contrefaçon (Anti-Counterfeiting Trade Agreement).
[38] Protocole d’accord issu de la médiation Schwartz, « Pour un développement équitable de la musique en ligne », 2 octobre 2015, en ligne : https://www.culture.gouv.fr/presse/archives-presse/Archives-Dossiers-de-presse-2011-2018/Annee-2015/Presentation-du-protocole-d-accord-issu-de-la-mediation-Schwartz-Pour-un-developpement-equitable-de-la-musique-en-ligne.
[39] Voir l’étude exploratoire du ministère de la Culture, « Présence et stratégies d’intégration des groupes d’entreprises dans le secteur des festivals de musiques actuelles entre 2009 et 2017 », en ligne : https://www.francefestivals.com/media/francefestival/189240-dgca_etude_presence_groupes_festivals_musiques_actuelles_2009_2017-1.pdf.
[40] Organisations représentantes de la musique enregistrée, mais aussi du live ou des artistes.
[41] Transfert décidé par la loi LCAP. L’Observatoire était jusqu’alors hébergé à la Cité de la musique.
[42] Le rapport EY-SACEM de 2014 sur le rayonnement des industries culturelles tend à démontrer que la filière musicale pèse plus que le cinéma et l’audiovisuel.
[43] À noter que dans le programme culturel du candidat Macron, les seules mesures touchant potentiellement la musique étaient l’annonce d’un Pass Culture et la défense d’une meilleure rémunération pour les créateurs et les artistes. Par conséquent, pour les professionnels du secteur musical, rien ne laissait présager la relance du projet CNM.
[44] Discours du 8 juin 2017 au Midem : https://www.vie-publique.fr/discours/203064-declaration-de-mme-francoise-nyssen-ministre-de-la-culture-sur-lediti.
[45] À l’image de certaines sociétés de gestion collective et des représentants des musiques classiques.
[46] Prenons l’exemple du Syndicat national de l’édition phonographique (SNEP), qui voit à la fois une occasion de concrétiser un projet initialement soutenu par le secteur phonographique et une menace potentielle de taxation de ses sources de revenus, notamment le streaming. De son côté, l’Union Nationale des Syndicats d’Artistes Musiciens (Enseignants et Interprètes) de France CGT (SNAM-CGT) craint d’être écartée des discussions institutionnelles si elle ne s’implique pas dans le CNM.
[47] Lettre de mission du 22 juin 2017 : https://www.culture.gouv.fr/Espace-documentation/Rapports/Rassembler-la-musique-pour-un-centre-national.
[48] « Rassembler la musique », mission confiée à Roch-Olivier Maistre, octobre 2017, en ligne : https://www.culture.gouv.fr/presse/archives-presse/Archives-Communiques-de-presse-2012-2018/Annee-2017/Francoise-Nyssen-rend-public-le-rapport-de-Roch-Olivier-Maistre-sur-le-projet-de-maison-commune-de-la-musique.
[49] En l’espèce, le ministère de la Culture et ses directions.
[50] Selon nos entretiens avec de hauts fonctionnaires.
[51] La date de création du CNM peut être discutée : nous considérons dans ce papier qu’elle correspond à la promulgation de la loi du 30 octobre 2019 et, dans un souci de cohérence, retenons donc cette année dans notre schéma.